En tant que cycliste au quotidien, témoin de l’évolution rapide des pratiques sur les pistes cyclables, j’ai été intrigué par une annonce récente : la commune de Saint‑Genis‑Laval (dans la métropole lyonnaise) prévoit d’installer des radars sur une de ses pistes cyclables, en réaction à la montée en puissance des vélos électriques. L’article de cat29.fr (repris dans Le Télégramme) explique que, selon la mairie, la vitesse excessive de certains VAE rend l’environnement dangereux pour tous.
Je vous propose qu’on échange sur cette initiative, avec les avantages, les risques, et le débat qu’elle suscite.
Pourquoi des radars sur une piste cyclable ?
L’installation prévue concerne la voie verte du parc Beauregard, très fréquentée quotidiennement, connexion entre centre-ville et gare. Les excès de vitesse — jusqu’à 40 km/h sur une portion limitée à 25 km/h — soulèvent des alertes basées sur des relevés policiers.
La maire Claire Delage évoque une « autoroute à deux roues », un constat aigu que nombre d’entre nous ont observé : des VAE rapides doublant sans prévenir, voire sans freinage en présence d’enfants.
Sur le plan technique, ces radars seraient des radars pédagogiques ou sanctionnateurs (selon ce que décidera la commune), destinés à réguler la température cycliste sur la voie et à réconcilier la cohabitation entre différents types d’usagers.
✅ Arguments en faveur des radars
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Sécurité améliorée
Les VAE et fatbikes débridés peuvent dépasser les 40 km/h, mettant en danger les cyclistes plus lents et les piétons (en contextes partagés). Un radar peut inciter à ralentir, réduisant les risques de chocs. -
Respect des limitations existantes
Les pistes sont définies avec une police de la circulation (limite souvent à 25 km/h) et des radars renforcent cette discipline, rappelant que ce n’est pas une autoroute. -
Effet pédagogique
Comme avec les sas vélos à Paris ou Nantes, les radars pédagogiques peuvent éduquer les usagers à mieux respecter les limitations. -
Uniformisation des pratiques
Lorsque la vitesse de certains engins diverge trop (fatbikes, trottinettes boostées), cela crée du risque. Le radar peut limiter les écarts pour une meilleure cohabitation. -
Innovation locale et pilote utile
L’initiative suit l’exemple de Villeneuve‑Loubet ou d’Amsterdam, qui expérimentent solutions techniques ou radars sur pistes, sans attendre la loi nationale.
❌ Arguments contre : les critiques soulevées
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Sentiment de surveillance excessive
Instaurer des radars sur une voie cyclable peut être perçu comme une culture de la sanction, non d’accompagnement. Certains craignent que cela dissuade la pratique. -
Lenteur administrative & technique
La mise en place locale d’un radar peut prendre du temps et coûter cher, alors que d’autres priorités existent : entretien, signalisation, élargissement. -
Risque de carottes vélétiques
À l’instar des radars sur route, certains craignent un usage punitif plus que sécuritaire, par exemple avec des PV massifs sur des vélos de partage (sans assurance). -
Effets gadget sans effet réel
Certaines études montrent que les fatbikes et trottinettes boostées (sans radar) continuent d’approcher les 40 km/h, sans effet dissuasif notable. -
Problème d’égalité légale
Réguler les VAE par radar ne résout pas l’absence d’homologation sur ces vélos rapides : pas d’immatriculation, pas d’assurance.
🧭 Alternatives possibles
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Renforcement de la signalisation (panneaux, marquages au sol) ou décalage des limites à 20 km/h pour lisser le comportement.
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Élargissement des pistes (comme Lyon → 4 m) pour permettre un meilleur partage,
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Campagnes de sensibilisation ciblées, et contrôles ponctuels sans sanction permanente.
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Technologie embarquée : Amsterdam teste l’installation de boîtiers pour limiter les VAE à proximité des écoles, infrastructures sensibles
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Différenciation des voies : créer des pistes à “circulation rapide” vs “tranquille”, comme font déjà certaines villes nordiques
🎯 Réflexion : entre sécurité et liberté
À titre personnel, roulant à vélo non électrique chaque jour, je ressens l’inconfort d’être parfois doublé de près par certains usagers électrisés, sans toujours l’avertissement qui va bien. Je ne pratique pas en zone fortement urbanisée, ce qui augmente sans aucun doute les occasions de se croiser.
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La piste cyclable est un espace partagé : enfants, joggeurs, familles. Le radar peut restaurer une cohabitation apaisée.
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Mais la sanction n’est pas utile pour tous. Une solution pédagogique et visible (écrans affichant la vitesse) serait sans doute plus équilibrée.
📊 Données et chiffres clés
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738 000 VAE vendus en 2022 : 28 % des ventes de cycles
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Nombre croissant de fatbikes, générant des tensions de vitesse jusqu’à 40 km/h
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Règles européennes : au-delà de 25 km/h, les engins sont assimilés à des cyclomoteurs, soumis à immatriculation et assurance.
🔎 Quelques cas concrets de radars vélo
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Villeneuve‑Loubet (06) : mise en service d’un radar sur piste cyclable test.
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Nantes / Paris : radars pédagogiques pour les sas vélo (automobiles qui les encombraient)
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Flandres et Belgique : radars sur speed pedelecs > 30 km/h sur cyclostrades
Ces expériences montrent que la surveillance ciblée est possible et potentiellement efficace.
En résumé
L’installation de radars sur pistes cyclables est d’abord une solution technique à un problème concret : les vitesses excessives des VAE et fatbikes. Elle peut améliorer la sécurité, mais doit s’inscrire dans une stratégie globale :
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Clarification du cadre juridique : que se passe-t-il lorsque la vitesse dépasse 25 km/h ?
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Objectif pédagogique avant répressif : radars pédagogiques, sensibilisation, signalisation visible.
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Aménagement dédié : élargissement des voies, voies différenciées, technologie embarquée.
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Approche progressive : phase pilote, concertation, ajustements.
En tant qu’utilisateur, je salue l’initiative — sous réserve qu’elle soit proportionnée, bien pensée et accompagnée d’une communication claire. L’objectif n’est pas de punir, mais de retrouver un usage serein, où le vélo — qu’il soit assisté ou non — reste un vecteur de mobilité douce et conviviale.
🔜 Perspectives à suivre
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À l’automne 2025 : mise en service du radar à Saint‑Genis‑Laval, avec premières mesures.
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Étude de l’impact : réduction de la vitesse, retours d’usagers, données d’accidents/incident.
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Extensions possibles : adoption dans d’autres communes si succès, harmonisation des politiques.
Qu’en pensez-vous ?

📌 Sources :
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Article « Cette commune va installer des radars… » sur cat29.fr
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Enjeux de la SUVisation et des fatbikes débridés lemonde.fr
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Expérimentation néerlandaise de boîtiers embarqués radiofrance.fr
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Données de vente de VAE en France cleanrider.com
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Cas des radars/boîtiers pour vélo en Flandres fr.wikipedia.org
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Document technique sur les sas vélo et radars à Nantes/Paris fr.wikipedia.org
Je ne sais pas si à Paris la situation est semblable ?